Tout être humain, qu'il soit homme ou femme est bâti sur le modèle de l'imperfection, libre à lui d'user de fard pour cacher ce défaut.

Camille-Angèle est belle autant qu'elle ne l'est pas, en effet, elle correspond à la mode de l'époque sans lui correspondre. Comme sur le plan psychologique, elle n'est pas parfaite. Bien qu'elle les garde souvent baisser, ses yeux sont ravissants tant leur profondeur azure attire le regard et le pousse à s'y noyer et bien qu'ils aient tendance à la trahir de trop, ils n'en restent pas moins brillants d'intelligence ce qui est tout à son avantage. Elle est toujours bien habillée, soignée, propre sur elle avec ses cheveux blonds clairs tout à fait à la mode, plutôt lisses mais pas totalement sont toujours parfaitement coiffés. Sa peau est pâle comme le désire l'usage, couverte de quelques bijoux distraits et élégants qui pour être simples n'en sont pas moins radieux, la faisant ressembler à une princesse, à un ange quand son sourire vient à orner son ravissant visage pourtant fin. Effectivement, l'ennuie vient de là, elle est fine, maigre même ce qui n'est pas en vogue et si elle parvient à compenser ce point, il reste le bémol à sa beauté.

Les secrets sont comme les fils qui tiennent les marionnettes seulement, eux, ce qu'ils tiennent, ce sont les hommes, ils les articulent, les façonnent à leur image... Et pour être beau, on en n'est pas moins laid.

Camille-Angèle est née dans le secret, a grandit dans le secret, n'est entourée aujourd'hui que de cela. Le secret avait sur cet être jeté son dévolu avant même qu'elle ne fasse montre de la moindre volonté. En effet, d'où venait sa mère ? Qu'avait-elle vécu ? Qui était son père ? Il arrive souvent à la jeune-femme de se demander si sa mère était une prostituée ou si elle était mariée mais qu'elle avait un amant et que son époux, le découvrant avait voulu la tuer et qu'elle avait prit la fuite. Nombre d'histoires fantaisistes lui viennent parfois en tête, plus farfelues les unes que les autres. Le secret de ses origines berça son enfance alors que sa soeur se voyait incapable de lui répondre, ses souvenant plus vague d'année en année. Finalement, Camille-Angèle arriva à la cour de France où se multiplient chaque jour et dans le plus grand secret intrigues et complots.
Cette jeune fille s'est toujours montrée de nature curieuse, dès son plus jeune âge, les langues étrangères la passionnant. Discrète, elle préfère baisser la tête et donner raison que d'assumer ses opinions, non par lâcheté, mais par prudence. Douce, elle fait toujours montre de sa générosité et de sa compassion pour tout le mal que vivent les autres. Optimiste, elle essaye toujours de voir le rayon de soleil dans la nuit noire. Pieuse, elle reste fidèle à ses valeurs. Travailleuse, elle ne rechigne jamais à la tâche et se révèle appliquée. Cela fait-il d'être un être à part par sa perfection ? Non, son caractères aux abords idylliques a ses revers. Elle a notamment tendance à se montrer solitaire et en retrait, comme si elle se contentait d'être spectatrice de la vie pouvant l'entourer et de sa propre vie. De plus, si elle est de nature docile, il lui arrive de se montrer impulsive. Nul être n'est parfait et ses impairs le savent bien.

Tout le monde n'a pas la chance de naître dans de somptueuses habitations, entouré de dizaines de gens, dorloté avant même de voir le jour. Camille-Angèle, loin d'avoir cette chance, est née pour sa part dans la boue la plus crasseuse de tout Paris, poisseuse du sang de sa mère, son premier cri se répercuta contre les murs de la ruelle sombre où la pauvre femme, enceinte de plusieurs mois avait trouvé refuge avec sa fille aînée, âgée de cinq ans. Ce fut d'abord la terreur pour Mathilde, mais bien vite, cette peur se changea en délivrance. En effet, le cri de l'enfant avait attiré quelqu'un, et pas n'importe qui, un médecin et son épouse qui prirent en charge la mère, sa fille et le nouveau-né. C'était un petit médecin sans fortune, gagnant de l'argent comme il pouvait pour nourrir une épouse stérile, il ne parvint pas à sauver la femme mais décida d'adopter les deux enfants, Mathilde et le bébé qui n'était autre qu'une petite fille qui fut baptisée Camille-Angèle : Camille étant le prénom de sa mère cmme le leur apprit Mathilde et Angèle pour avoir sauvée sa soeur en criant à l'instant de sa naissance, la désignant comme son ange gardien.
Ainsi les deux soeurs grandirent-elles heureuse dans un foyer démuni mais tout à fait respectable. Le couple habitait dans une petite maison aux couloirs étroits, les pièces, au nombre de quatre n'étaient pas grandes et quasiment vides. Dans la cuisine, on ne trouvait qu'une table sur laquelle étaient souvent posés des légumes servant à la soupe quotidienne ainsi qu'un pain et un jambon suspendu au mur, dans la salle à manger, la table prenait presque toute la place avec les sièges qui l'entouraient. Les deux autres pièces étaient les chambres de Pierre et Capucine Le Bris et des deux soeurs qui partageaient la leur. Bien qu'il ne fut pas très riche, Monsieur Le Bris ou plutôt Docteur Le Bris comme l'appelait beaucoup de monde insista pour que ses filles, même adoptives reçoivent une éducation correcte, il fit appel pour cela à plusieurs de ses connaissances qui l'aidèrent à trouver un précepteur de qualité ne prenant pas trop cher. Ainsi Mathilde et Camille-Angèle apprirent-elle le latin, le grec, l'anglais, l'espagnol, l'italien, la danse, la musique, l'équitation, l'art de la langue, la philosophie et quelques notions de mathématiques et de sciences physiques, les faisant bien plus érudites que nombre de jeunes filles de leur situation. Mathilde qui aimait l'art et particulièrement le chant se mit bientôt en quête d'un protecteur ou d'une protectrice qu'elle trouva bientôt ce qui lui ouvrit les portes de grands salons. Camille-Angèle, elle, restait plus simple et plus modeste, elle préférait les langues à l'art et la littérature à la musique. Le destin de la cadette fut scellé un soir que, rentrant des jeux, Pierre annonça à son épouse avoir dépensé toutes leurs économies.
"Tu es un idiot Pierre Le Bris ! Je me demande qui a bien pu me donner un tel bougre d'époux !
-Capucine, s'il te plait... Calme-toi...
-Que je me calme ? Mais Pierre ! Qu'allons nous faire ? Nous avons nos filles à nourrir ! Nous allons devoir vendre certains de nos biens..."
Capucine avait des cheveux noirs, déjà grisonnants et un teint légèrement halé à la méritérranéenne, mais ce soir là, elle semblait abattue, désemparée plus encore que furieuse, preuve en était qu'elle avait baissé la voix ce qui donna l'occasion à son mari de lui annoncer une nouvelle d'importance.
"Le Roy a ordonné que les travaux de Versailles commencent sous peu et j'y ai été engagé comme médecin. Ce nouveau palais s'annonce fastueux, ils chercheront de nouveaux domestiques. Mathilde et Camille-Angèle pourraient allez y travailler, tu ne penses pas ?"
Le débat sur ce sujet dura jusqu'à loin dans la nuit, achevant de décider du sort, de l'avenir, du destin, appelez cela comme vous le voudrez [: le cheval] des deux soeurs. Dès le lendemain, la famille dû renoncer à ses chevaux et à d'autres de ses biens, Mathilde à plusieurs de ses oeuvres, Camille-Angèle à nombre de ses livres, Madame Le Bris à quelques-unes de ses robes. Les leçons dont bénéficiait encore Camille-Angèle prirent fin peu après et quand les travaux commençèrent, Pierre Le Bris se montra des plus appliqué à la tâche, son rôle sur le chantier était de soigner les blesser, d'accompagner les mourants mais surtout de certifier le décet des nombreux malheureux qui avaient la malchance de faire dans leur labeur un faux pas responsable d'une mauvaise chute dont peu réchappaient.
Les travaux durèrent de longues journées, de longues semaines, de longs mois, de longues années avant qu'enfin le Roy, Louis XIV, souverain de France et de Navarre mais aussi toute la cour de France ne s'y installe. Au moment de l'arrivée de tout ce beau monde, Camille-Angèle était déjà à la tâche, âgée de bientôt vingt ans, élégamment coiffée et habillée bien que de façon simple, elle passait entre les nuages de poussière que soulevaient les artistes encore à l'ouvrage, aidant à aménager les appartements royaux et nobliaux. Sa chambre serait désormais légèrement plus grande que celle qu'elle partageait avec sa soeur et lui semblait plus douillette. Toutefois, elle avait bien vite comprit qu'elle en profiterait peu, une fois la cour arrivée, il fallu s'activer pour défaire leurs affaires tandis qu'aucun d'eux ne semblait se rendre compte de l'application de tous pour faire au mieux, jugeant bon de monter le ton pour intimider certaines maladroites dont pour son plus grand bonheur la jeune femme ne faisait pas partir. Une fois la chose faite, les courtisans et sa Majesté installés, commençèrent de nombreuses fêtes, banquets, bals, spectacles, il fallait toujours tout installer, tout assister, tout ranger, tout nettoyer. Camille-Angèle pourtant ne protestait pas, jamais, pas un instant, elle se contentait d'obéir, passant entre les femmes emplumées et les hommes emperuqués, portant des plateaux lourds à ses mains d'enfant tandis que les musiciens accompagnaient la moindre cérémonie.
Grande fête au château comme en d'anciens temps, les belles et les eaux, nobliaux, noble sang, de tout le royaume ils sont venus dansant... Tournent les vies oh, tournent les violons... Redoublent les fêtes et les rires et les danses elle s'émerveille en remplissant les panses ; le bruit, les lumières ; et la nuit qui s'avance... Tournent les vies oh tournent et s'en vont... Tournent les vies oh, tournent les violons...